Bien organiser son espace de travail est gage de productivité pour l’entreprise et de qualité de vie au travail pour les collaborateurs. Mais comment le rangement impacte-t-il réellement notre esprit, au point de nous rendre plus efficaces ? Nous avons voulu approfondir le sujet en interviewant Jean-Pierre Zana, fondateur de ZConcept, ergonome, ancien expert conseil en TMS auprès de l’INRS[1], rédacteur de normes ISO en ergonomie, cadre de santé, kinésithérapeute et psychologue clinicien. Morceaux choisis…
Manutan France (MAF) : Il paraît naturel, voire évident, qu’un environnement de travail rangé et ergonomique est plus agréable. On a également l’intuition d’une plus grande efficacité… Mais sait-on pourquoi ?
Jean-Pierre Zana (JPZ) : C’est effectivement une logique ancienne et bien ancrée dans l’inconscient collectif. Et notre intuition est bonne : nous sommes réellement plus sereins, et donc plus disponibles pour nos tâches, dans un espace de travail où règnent sécurité et confort physique. In fine, cela nous donne la possibilité de répondre dans de moindres contraintes aux exigences légitimes de productivité de l’entreprise. La raison psychologique tient dans une limitation physiologique des humains : nous ne pouvons tout simplement pas gérer une charge mentale trop importante[2] sous peine de stress. Vous avez là une bonne définition de l’ergonomie !
MAF : Comment s’établit ce lien entre une contrainte physique – l’agencement de l’atelier – et le stress ?
JPZ : D’abord le stress n’est pas seulement psychologique ! D’une part parce qu’il génère de réels effets physiques (tachycardie, tensions musculaires, manifestations dermatologiques etc.). Et d’autre part parce qu’il n’y a qu’un pas entre une petite gêne physique et une vraie contrariété. Prenons un exemple : si vous devez enjamber une flaque d’eau 100 fois par jour en portant une charge, qu’allez-vous conclure ? Que votre employeur se moque de votre sécurité ! L’humain est un animal psycho-somatique (ou somato-psychique, je vous laisse choisir). Autrement dit, stress physique et psychique se répondent, s’entretiennent, dans un cercle vicieux.
MAF : Quels gains peut-on attendre d’un bon agencement de son atelier ?
JPZ : « La main suit le cerveau » dit l’adage. En ergonomie, on apprend qu’elle est l’organe effecteur du cerveau. Un esprit serein aura donc un geste sûr et plus efficace. Ce geste sera donc valorisant, rassurant. On peut ainsi amorcer un cercle vertueux qui au final réduit significativement les accidents du travails, l’absentéisme, les TMS, les tensions entre collègues… Tout cela est bon pour le moral bien sûr, mais aussi pour les performances des salariés, de l’entreprise, et leur image. Il est difficile de chiffrer les gains d’une bonne démarche ergonomique (et chaque activité est unique), mais dans toutes les entreprises où j’ai vu des ergonomes intervenir, et qui utilisent des méthodologies pragmatiques comprises des opérateurs et des managers, ou des outils comme les 5S, les résultats ont été rapides et très significatifs.
[1] Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles
[2] C’est l’ergonomie cognitive, évoquée dans notre Magalogue « Ergonomie au travail », disponible sur notre blog.
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